La SNCF a officialisé aujourd’hui la commande de 14 rames TER à alimentation mixte. Les moteurs électriques de ces automotrices pourront être alimentés soit de manière classique par la caténaire, soit par une pile à hydrogène qui prendra le relais sur les voies non-électrifiées.
Par Bernard Aubin
Quatre régions se sont portées candidates : Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est et Occitanie. Ces nouvelles rames ne devraient circuler « en service commercial » sur le réseau français qu’en 2025, après deux années de test. L’Allemagne a, quant à elle, pris de l’avance. La mise en service progressive de 41 de ces trains, produits en Alsace par Alstom, débutera en 2022.
Aucun polluant
L’idée qui a prévalu à la construction de ces TER du futur paraît séduisante. La seule émission « carbone » de ces rames se limite à… quelques litres d’eau. Pas de gaz à effet de serre, aucun polluant de quelque sorte que ce soit : une merveille. Tout pour séduire nos amis écolos et redorer le blason d’un gouvernement régulièrement tancé pour le manque d’ambition de sa loi climat. Le « moteur à eau », on en a rêvé, Alstom l’a fait… ou presque. Car avant de s’extasier sur cette prouesse technique, il serait bon de s’intéresser aux conditions de production du « carburant propre » en France. C’est là que le bât blesse.
Comment produire l’hydrogène?
Il existe, en effet, quatre types de production de l’hydrogène. Pour commencer à base d’eau (H2O), tout simplement. Une simple électrolyse permet de séparer les atomes constitutifs de cet élément : de l’oxygène d’une part (O) et de l’hydrogène d’autre part (H2). Jusque-là tout va bien. Sauf que pour réaliser l’électrolyse, il faut… de l’électricité. Se pose alors la question du mode de production de cette énergie : verte ? nucléaire ? fossile ? La production d’hydrogène selon cette méthode demeure à ce jour anecdotique. Elle est en outre 4 fois plus chère que sous d’autres formes. Précisons que sur 5 kWh d’électricité consommés pour faire de l’hydrogène, seul 1 kWh sera disponible pour alimenter les moteurs du train.
Les trois autres procédés sont bien moins onéreux. L’hydrogène est produit à base de gaz naturel, de pétrole ou de charbon. 96 % de l’hydrogène actuellement produit sont issus du « vaporeformage » d’hydrocarbures. Un procédé qui pour une tonne de H2 génère entre 10 et 11 tonnes de CO2, directement émises dans l’atmosphère. Un impact loin d’être neutre ! Des TER à motorisation mixte, diesel-électrique, parcourent depuis des années une partie du réseau SNCF. En offrant les mêmes avantages : sur les parties d’itinéraires non-électrifiées, un moteur diesel prend le relais de la caténaire pour alimenter les moteurs de traction.
Des barils de pétrole
Précisons qu’avec une telle motorisation, 60 % du carburant partent déjà en chaleur. Seuls les 40 restants sont transformés en énergie mécanique. Un rendement qui baisse encore si l’on interpose une étape supplémentaire : la transformation d’ un carburant qui a mauvaise presse en un autre réputé non-polluant. Cette opération de « verdissement » du combustible ajoute des coûts de production et une pollution significative engendrés par ce procédé. Au final, un TER à hydrogène nécessitera, à parcours égal, une consommation de fioul beaucoup plus élevée que si ce carburant avait directement alimenté une génératrice diesel embarquée, technologie exploitée depuis des années.
Dans le ferroviaire, on a coutume de dire qu’un train peut en cacher un autre. Qui pourrait croire que ce merveilleux carburant propre qu’est l’hydrogène cache en réalité une forêt de barils de pétrole ?
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