JEUX OLYMPIQUES - Le tableau est presque parfait. Si l’on excepte l’élimination piteuse des footballeurs, les équipes françaises ont toutes brillé dans les sports collectifs aux JO de Tokyo, offrant de nombreuses médailles à la délégation tricolore au Japon.
En handball, après le sacre des hommes, les femmes tenteront d’en faire autant ce dimanche. Elles essaieront aussi d’imiter les volleyeurs sacrés champions olympiques et seront au pire médaillées d’argent comme les basketteurs. Et du côté de l’équipe féminine de basket, malgré une élimination en demi-finale contre le Japon, le bronze décroché face à la Serbie confirme la place des Bleues parmi les toutes meilleures nations mondiales est confirmée, tout comme en rugby à VII où les Françaises ont fini argentées.
Certes on peut y voir un alignement des planètes puisque toutes ces équipes se sont sorties de matches pièges ou ont évité les tirages défavorables (sans la mauvaise surprise de perdre contre des adversaires supposément plus faibles) mais il s’agit surtout de l’aboutissement d’un long processus de montée en puissance. Car si cette profusion de bons résultats est presque unique pour une nation aux JO dans les “sports co”, il n’est pas tout à fait surprenant de voir la France aussi bien réussir avec ces ballons.
Les dynasties du hand français
Si l’on s’intéresse au handball par exemple, l’équipe masculine est l’une des plus belles dynasties du sport français. Ne serait-ce qu’aux Jeux olympiques où elle reste sur trois finales consécutives (or à Pékin en 2008 et à Londres en 2012, argent en 2016 à Rio). Et l’on peut ajouter à cela quatre titres et une troisième place sur les six derniers championnats du monde, soit depuis 2009.
Depuis les années 1990, décennie des premières médailles du hand français, l’équipe a su se renouveler en permanence. Comment? Avec un remplacement progressif des éléments vieillissants par des joueurs plus jeunes, lesquels ont d’abord été couvés de manière à prendre de l’expérience avant de gagner en importance au sein du collectif. Résultat: sur les quinze joueurs sacrés en 2008, il n’en reste plus que trois à Tokyo (Luc Abalo, Nikola Karabatic et Michaël Guigou). Et l’un des joueurs de l’équipe n’est autre que Melvyn Richardson, fils de Jackson, la première star du hand français, médaillé en 1992 à Barcelone.
Le constat est peu ou prou le même pour leurs homologues de l’équipe féminine: médaillées d’argent à Rio en 2016, championnes du monde en 2017, présentes trois fois de suite sur le podium de l’Euro (or en 2018, argent en 2020 et bonze en 2016), voilà un pedigree éloquent. Et comme chez les garçons, si l’on remonte au début du XXIe siècle, la progression est évidente, les Françaises sortant de l’anonymat (et de longues absences dans les rendez-vous internationaux) à l’orée du siècle pour s’imposer aujourd’hui comme une place-forte du handball mondial.
Et là encore, la constitution de l’équipe explique ces succès. Entre les joueuses d’expérience présentes depuis une dizaine d’années sous le maillot bleu (Allison Pineau et ses 250 sélections, les gardiennes Amandine Leynaud et Cléopâtre Darleux qui ont CV long comme le bras), d’excellents clubs français qui offrent un vivier de talents rare (Brest était finaliste de la Ligue des champions cette année et place cinq joueuses en équipe de France par exemple) et un renouvellement constant de l’effectif (on pense à Pauletta Foppa, tout juste 20 ans et déjà intégrée au groupe pour le titre européen de 2018), la recette est rodée pour bien figurer au plus haut niveau.
Le basket tiré par ses stars
Cela vous fait penser à un autre sport de gymnase, où la balle un peu plus grosse? C’est normal puisqu’au basket aussi, chez les femmes comme chez les hommes, les résultats récents des équipes de France permettaient de croire, avant le début des Jeux, à des médailles olympiques au Japon.
En effet, les Bleues du basket restent sur cinq finales de suite (toutes perdues) et même sept podiums consécutifs à l’Euro, en plus d’un titre de vice-championnes olympiques à Londres en 2012. La preuve que l’équipe coachée par Valérie Garnier est stabilisée au plus haut niveau, après les titres de championnes d’Europe en 2001 et 2009. Là aussi, l’habitude du très haut niveau et le brassage des générations permettent d’expliquer la régularité: les intérieures d’expérience Sandrine Gruda (34 ans) et Endy Miyem (33 ans) côtoient dans l’équipe Marine Johannès (26 ans) ou Gabby Williams (24 ans), deux étoiles montantes de leur sport qui évoluent au États-Unis, mais aussi deux jeunes femmes tout juste entrées dans la vingtaine (Marine Fauthoux et Iliana Rupert), deux immenses potentiels qui viennent d’être draftées par de prestigieuses équipes américaines. Une complémentarité qui apporte des résultats, et qui assure la continuité de l’équipe pour les années à venir et notamment les JO de Paris en 2024.
Une situation encore plus évidente chez les hommes. Car depuis le début des années 2000 et l’avènement de la génération Parker, Diaw, Turiaf, le basket français est passé dans une nouvelle dimension. Chaque année, de nouveaux joueurs tricolores débarquent en NBA, côtoient les plus grands joueurs, disposent d’un rôle toujours plus important (Rudy Gobert est trois fois meilleur défenseur du championnat), ce qui fait mécaniquement monter le niveau de l’équipe. D’autant que les sélectionnés qui n’évoluent pas outre-Atlantique à l’heure actuelle y sont souvent passés, y iront sans doute un jour ou ont choisi l’excellence dans les meilleures équipes européennes (après une expérience décevante en NBA, Nando de Colo est devenu la référence continentale).
De quoi figurer de plus en plus fréquemment sur les podiums internationaux, et de battre des équipes face auxquelles elle n’aurait auparavant jamais eu la moindre chance. Les États-Unis ont été sortis en quart du Mondial 2019 puis battus à nouveau à Tokyo au début des JO, la superstar Luka Doncic a connu en demie du tournoi olympique sa première défaite sous le maillot de la Slovénie, les Espagnols ont été balayés lors du triomphe européen de 2013, comme les Lituaniens et les Australiens lors de divers affrontements. En clair, portée par des joueurs formés auprès de la génération Parker-Diaw (lequel est aujourd’hui manager de l’équipe et l’accompagne dans un rôle de grand-frère) et qui assument désormais un rôle de leader (on pense à Evan Fournier qui a parfaitement rebondi après n’avoir pas été appelé aux Jeux de Rio, étant meilleur marqueur des Bleus à l’Euro 2017, puis au Mondial 2019 et aux Jeux en cours), l’équipe de France est là encore devenue ces dernières années une équipe qui compte (et qui est crainte).
Une différence flagrante avec d’autres sports
Restent enfin les petits nouveaux du volley, qui ont décroché lors de ces Jeux leur toute première médaille olympique. Le résultat d’une émergence plus récente que les sports cités plus haut, mais tout aussi impressionnante et sûrement partie pour durer. Après avoir très peu gagné au 20e siècle, les Français ont connu une première poussée de fièvre au milieu des années 2000 (2es de l’Euro en 2003 et 2009, finalistes de la Ligue mondiale en 2006). Mais c’est surtout depuis que la génération de la star mondiale Earvin Ngapeth a pris le pouvoir avec à sa tête le sélectionneur Laurent Tillie que les résultats s’enchaînent : double victoire en Ligue mondiale en 2015 et 2017, podium en 2016, 2018 et 2021. Ce qui permet aujourd’hui aux Français d’atteindre un premier podium aux JO. Et avec l’arrivée du légendaire coach brésilien Bernardinho après les Jeux, c’est peu s’avancer que dire que l’avenir promet encore de nombreux succès.
Un optimisme qui vaut donc -on l’a vu- pour les sports collectifs français (d’autant qu’aux JO 2024, la France devrait présenter une équipe infiniment plus compétitive que cette année en football, et que les Bleus seront présents dans toutes les disciplines du fait de leur statut d’organisateurs), mais qui n’est en revanche pas partagé dans tous les sports, où ce mélange entre générations et cette culture de la gagne a montré un net recul lors des Jeux japonais.
Que ce soit en cyclisme (deux médailles de bronze sur la piste), en natation, où la seule récompense du clan français est venue de l’ex-retraité Florent Manaudou, égalant le pire bilan du siècle, à Sydney en 2000, ou en athlétisme où Kevin Mayer est péniblement parvenu à accrocher l’argent alors qu’il était l’immense favori du décathlon, les bilans ont été désastreux.
Tout cela n’augure pas grand chose de bon pour 2024. André Giraud, le président de la Fédération française d’athlétisme, a par exemple reconnu ce vendredi 6 août que les résultats des Bleus aux Jeux olympiques de Tokyo étaient “en deçà des espérances” (l’objectif annoncé était d’entre 4 et 6 médailles). Et s’il promet que le réservoir de talent et qu’une future réorganisation des structures d’encadrement permettront de corriger le tir dans trois ans, aucun jeune athlète français n’a émergé à Tokyo. Un constat qui peut être partagé en natation, où le glorieux ancien Yannick Agnel a déploré un “manque d’humilité” pour expliquer ce triste palmarès tokyoïte, même si quelques jeunes nageurs ont montré des promesses (Maxime Grousset, 4e sur 100 mètres nage libre notamment).
80 médailles pour Paris 2024?
Mais “2024, ça arrive vite”, prévient le nageur, double médaillé d’or à Londres. Un avis que partage Brigitte Henriques, la présidente du CNOSF (le Comité national olympique et sportif français), qui déclarait sur Europe 1 ce vendredi 6 août: “Il faudra vite enclencher une dynamique encore plus forte pour Paris 2024″.
Prenant l’exemple des Japonais, qui ont réussi d’excellents JO à domicile cette année, elle compte ainsi sur un investissement massif de l’État, le recrutement d’entraîneurs de qualité et une facilitation du travail des fédérations. En 2017, la ministre des Sports d’alors, l’ancienne escrimeuse Laura Flessel avait fixé un objectif de 80 médailles lors des Jeux de Paris. En dépit du succès des sports collectifs à Tokyo (et de la razzia des judokas), il faudra sans doute un immense effort du sport français dans son ensemble pour le tenir ne serait-ce qu’aux deux tiers.
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